Ne ressentez-vous pas vous aussi cette sensation de vous voir pousser des ailes lorsque vous démarrez un gros projet qui vous tient à cœur ou quand s’amorce une nouvelle période de votre vie?
Vous voyez, cette période de genèse d’un projet ou d’un nouveau cycle pavé de milliers d’intentions (ou résolutions) qui vous amènent parfois à vous engager dans 10.000 chantiers à la fois? La main sur le cœur vous jurez (et vous y croyez en plus) que cette année, c’est sûr, vous allez faire du sport 5 jours sur 7, manger moins, et perdre 15 kilos en 2 semaines. D’office, c’est faisable.
Et puis non, quelqu’un vient vous convaincre que ce n’est pas possible, que vous risquez d’être débordé(e). Cette personne n’a peut-être pas tort pour être honnête. Mais aujourd’hui, on va décider de tendre aussi l’oreille vers d’autres voix (et voies ?) internes ou externes qu’on a du mal à entendre mais qui peuvent nous tirer vers le haut malgré l’inévitable chaos d’une vie bien chargée. Je vous propose un voyage dans le temps entre plusieurs anecdotes personnelles toutes reliées par un point commun inattendu : l’allemand (ja ja, je vous assure).
Sommaire (temps de lecture – 6 minutes)
- What If I fall? But Darling, what if you fly?
- Invincible…ou presque
- Séance de rattrapage des regrets
- Ces personnes lumineuses qui nous font du bien
- Alors, elle avait raison ou pas la petite dame?
- Bref, préparez-vous à être débordé(e)
1. What if I fall ? But Darling, what if you fly ?
Je ne sais pas pour vous mais personnellement, c’est dans un état d’esprit on ne peut plus survolté que j’ai entamé mes études. Petit flashback en arrière à la fac de droit. Un nouveau monde s’ouvrait à moi : l’U-N-I-V-E-R-S-I-T-E.
Le graal de tout(e) intello, le temple du savoir où j’allais apprendre plein de choses compliquées et devenir une grande personne.
En bonne stressée de base que j’étais, j’avais même pris l’initiative de m’inscrire à deux semaines de cours préparatoires d’anglais organisés par l’université un peu avant que l’année académique ne commence (neeeerd alert !!! Et j’assume totalement hahaha).
C’est vous dire, on m’avait tellement bassiné les oreilles pendant mes études secondaires avec le fait qu’il serait pratiquement impossible de réussir et que 50% des gens, dont certainement moi, échoueraient ! J’avais alors décidé de prendre le taureau par les cornes et de mettre toutes les chances de mon côté.
J’allais soigneusement m’appliquer à ne pas devenir une statistique.
Au bout de deux semaines de ces cours préparatoires – durant lesquelles j’ai d’ailleurs rencontré celle qui deviendra quelques années plus tard ma collègue avocate et amie fidèle (cf. l’autre noire du cabinet) – j’ai commencé le cursus juridique tant redouté.
Pour corser le tout, ma nouvelle copine m’avait en plus convaincue d’essayer d’intégrer un programme de droit bilingue français-anglais que proposait cette université alors que cela ne m’avait pas du tout traversé l’esprit.
J’ai été scotchée par le naturel avec lequel elle envisageait de s’embarquer dans ce programme plus difficile que le programme de base et elle semblait estimer qu’évidemment j’allais aussi réussir le test pour cette option. Cette confiance en elle doublée d’une sororité et d’encouragement sortis de nulle part m’ont littéralement donné des ailes.
S’entourer de personnes qui vous tirent vers le haut est plus que salvateur.
Sans sa suggestion, je n’aurais même pas imaginé emprunter ce détour en deux langues. Si j’ai bien retenu une chose, c’est de ne pas sous-estimer à quel point le petit coup de pouce qu’on donne innocemment à quelqu’un peut littéralement être une vraie source de soutien et d’élévation.
2. Invincible…ou presque
La réussite du test d’accès au programme bilingue avait décuplé ma motivation. J’étais devenue invincible (si si je peux tout faire moi! English, Français, what else ?).
Lorsque je devais finaliser mes inscriptions aux différents cours et options, j’ai découvert que la faculté proposait un cours optionnel d’allemand qu’il était possible d’ajouter à notre cursus déjà bien chargé : – « Mais ouiiiii, bien sûr. L’allemand devait être une très belle corde à ajouter à mon arc et augmenter mes chances pour l’avenir non ? ».
Prête à conquérir le monde avec mes langues, mon droit, mes copines qui me tiraient vers le haut, je voulais enfin concrétiser l’affaire en me rendant au secrétariat de la faculté pour valider mes options. La secrétaire était très gentille et sympathique, presque un peu maternelle. J’étais en confiance.
Lorsque je lui ai expliqué mon plan on ne peut plus ambitieux, elle m’a gentiment dit :
« Les cours d’allemand, je vous les déconseille Mademoiselle. D’expérience, vous risquez d’être débordée, vous allez être noyée surtout si vous ajoutez un cours d’une langue assez difficile comme l’allemand au reste de votre programme déjà bilingue. »
Elle m’avait coupé sec dans mon élan.
Ce qu’elle me disait avait l’air tout à fait censé. Et d’ailleurs, elle devait avoir l’expérience la petite dame. Elle en a vu des étudiants passer. « Je ne veux pas passer du côté obscur de la statistique des 50 % on a dit ». Du coup, j’ai rangé mes ailes et confirmé mon choix (ou plutôt le sien ?) sans l’allemand.
Cette année-là, j’ai réussi ma première année haut la main : je me rappelle encore mon père m’annonçant les yeux remplis de fierté après la proclamation des résultats auxquels je n’avais pas pu assister (j’avais un job d’étudiant) que sa fille était cinquième de sa promotion.
Donc, elle avait forcément eu raison de me décourager? Je n’aurais jamais aussi brillamment réussi si j’avais ajouté l’allemand ? Qui sait ?
3. Séance de rattrapage des regrets
Des années plus tard, j’ai longtemps regretté de ne pas avoir écouté mon instinct et de ne pas avoir entamé ce fameux cours d’allemand auparavant, ne fût-ce que pour avoir les premières bases.
Dans le milieu professionnel, des notions d’allemand auraient pu certainement m’être utiles pour certains dossiers mais également dans ma vie personnelle (ai-je mentionné que mon mari est à moitié allemand ?).
Presque quinze ans après les premiers bancs de l’unif, j’ai finalement pris mes premiers cours d’allemand, c’était à l’entame de nos fiançailles il y a environ deux ans et demi (vaut mieux tard que jamais).
Mon but était de pouvoir parler avec mes beaux-parents (mon mari parle parfaitement le français et plein d’autres langues mais ça ce n’est pas si pertinent pour l’histoire même si je suis hyper fière de lui).
Avec le recul, je me rends compte que c’était le pire moment pour prendre ces cours car j’organisais un mariage (my big fat african-belgian-german-polish wedding -ah oui il est à moitié polonais aussi), j’étais débordée de travail (voir l’épisode 6 sur le surmenage), et par-dessus tout, j’étais dans un processus de changement de boulot. Pourtant j’ai décidé d’ajouter 3 heures d’allemand par semaine à ma vie déjà bien mouvementée (kill me now?).
On pouvait me dire ce qu’on voulait, et peu importe si j’étais pratiquement surmenée (j’ai pété quelques cables à la fin de l’organisation du mariage – « Bridezilla sors de ce corps !!! »), j’étais déterminée dans mon choix et dans l’objectif que je voulais atteindre : parler un allemand basique.
Alors, ok j’aurais pu m’éviter les quelques préludes inutiles du genre « Ich bin Frau W. und Ich bin schwarz » (bon je vais pas aller loin avec ça) si j’avais écouté ma petite voix des années auparavant.
Ca avait le don de m’énerver quand j’y repensais.
On dit souvent d’un ton moralisateur qu’il ne faut avoir aucun regret. Plus facile à dire qu’à faire quand vous souhaitez discutailler avec votre future belle-mère et que votre mari (le traducteur officiel) a eu la bonne idée de vous laisser seules un instant pour répondre à un appel (non mais quelle audace !). Que dire ? Ich bin schwarz ? (ça, elle le sait déjà je crois).
4. Ces personnes lumineuses qui nous font du bien
J’ai eu la chance d’avoir des beaux-parents juste géniaux et hyper compréhensifs. Finalement, cela a pris plus de temps que ce que j’aurais voulu mais ils étaient déjà tellement contents que je fasse l’effort de prendre des cours pour dialoguer avec eux. Ca valait toutes les listes de vocabulaire du monde.
En redoublant d’efforts (pour quelqu’un qui n’est pas du matin, se lever tous les samedis matins pour enchainer 3 heures d’allemand si ce n’est pas de l’amour et de la détermination je ne sais pas ce que c’est), un cours après l’autre, du haut de mes 32 ans, j’ai finalement décroché mon certificat A1 puis A2, en gros c’est le niveau de base qui permet d’avoir une conversation simple au présent ou passé sur sa journée, ses loisirs, le travail, la nourriture, etc. La base quoi (la nourriture c’est la vie).
Soyons clairs, je ne vais pas vous parler de Nietzche ou de Schopenhauer en allemand (ni en français d’ailleurs je vous rassure) mais je peux plus ou moins suivre une conversation et échanger, même quand mon mari sort de la pièce.
5. Alors, elle avait raison ou pas la petite dame ?
Tout cela pour dire que finalement, je suis persuadée qu’il ne faut pas rester sur un détail du passé ou une occasion soi-disant manquée mais plutôt faire avec ce qu’on a au moment où on est (on n’a pas le choix en même temps) :
- très honnêtement, le fait de ne pas parler allemand n’a absolument pas éclipsé mon parcours professionnel, cela aurait certainement été un plus mais ce n’était pas indispensable et pour ce qui est de mes études, sortir 5ème de sa promo (sans allemand certes) c’était déjà énooorme non ?
- Il n’est jamais trop tard pour atteindre ses objectifs : certes, j’ai dû partir de zéro pour apprendre cette langue quinze ans après mais j’ai vite rattrapé le retard car j’étais plus déterminée que jamais avec un objectif précis : pouvoir parler avec ceux qui allaient devenir mes beaux-parents. Concrètement, lorsque l’occasion d’atteindre un de mes objectifs s’est représentée, j’ai retenu la leçon et n’ai fait qu’écouter ma petite voix interne, quand elle m’a dit d’y aller.
- Les personnes qui vous tirent vers le haut sont de réels multiplicateurs pour se réaliser: la copine qui m’a poussée à aller plus loin que ce que j’avais initialement prévu ou la bienveillance de mon mari et mes beaux-parents face à mon niveau d’ « allemand pour les nuls » m’ont donné confiance et revigoré mon envie d’avancer, voire de me dépasser.
- Quant aux gens qui nous disent qu’on n’y arrivera pas et qu’il vaut mieux revoir nos ambitions à la baisse, parfois leurs conseils partent d’une bonne intention et sont avisés. Toutefois, je reste convaincue qu’il faut avant tout s’écouter même si parfois aux yeux des autres, on peut avoir l’air complètement excessive ou démesurée.
6. Bref, préparez-vous à être débordé(e)
Rien de toute cette histoire n’a été une petite promenade de santé.
Car dans la vraie vie ou rien n’a une fin magique ni idyllique, j’étais parfois au bout de mes forces tant à l’unif que pour ces foutus cours d’allemand à des horaires incongrus.
On insiste souvent sur le « Oui tu peux le faire » à coups de « Yes, you can ! » et autres blabla supposés motivants mais on omet de préciser que ça va faire mal, qu’on n’aura pas assez de temps ou même l’envie d’y aller et que ce sera parfois (ou même souvent) très décourageant.
Alors, oui, vous serez, vous aussi, certainement débordé(e) en tentant d’accomplir le projet ou les résolutions qui vous tiennent à cœur. Il faut s’y préparer mais pas pour autant abandonner.
Ca a l’air contradictoire ce que je vais dire mais je suis convaincue qu’il faut aussi écouter sa petite voix interne quand tous les signaux passent au rouge et qu’elle vous dit stop (on parlait d’apprendre à dire non dans l’épisode 6). On ne peut évidemment pas tout faire.
Dans mon cas, à un moment donné, j’ai fait une pause avec les cours lorsque j’avais trop de choses à gérer comme à l’approche du mariage par exemple. Mais cela ne m’a pas empêché de reprendre, quelques mois après, et obtenir le certificat A2 que je visais. D’ailleurs, pour être honnête, je suis en période de pause au niveau des cours, mais je reprendrai lorsque je le sentirai, sans pression. Ca se perd vite ; il ne vaut mieux pas rester sur ses acquis.
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Le printemps dernier, par une belle journée aux allures d’été dans un parc bruxellois, mon mari et moi avons été interrompus par un appel de ma belle-mère (qui ne vit pas dans le même pays que nous). A la fin de leur conversation, mon mari m’a spontanément passé son portable car sa mère voulait me dire bonjour. Plus aucune angoisse à l’horizon alors que cela faisait des mois que je n’avais plus parcouru une liste de vocabulaire. On a discuté ensemble très naturellement et même ri. Une conversation très basique, je vous l’accorde, mais finalement c’était mon objectif, non ?
« Tout vient à point à qui sait attendre » …et j’ai même envie d’ajouter « et à qui sait s’écouter. »
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Et vous, avez-vous des objectifs précis à atteindre cette année, ce mois-ci ou cette décennie? Si c’est le cas, ne vous laissez pas distraire par ceux qui vous disent (avec leurs propres peurs) que vous n’y arriverez pas et écoutez plutôt cette voix puissante au fond de vous qui peut vous pousser à réaliser ce que d’autres disaient impossible (true story).
A vos marques, prêts à être débordés ? Partez !
On est ensemble,
Mrs W.
4 comments
Always trust life’s timing. Chaque chose en son temps et tout à une (bonne) raison! La petite dame avait probablement raison (la mama qui parle ;-))
Always ! On est ensemble et merci de me suivre et partager. Hahaha on ne saura jamais pour la petite dame mais je crois comme toi qu’elle avait un sérieux argument 😉 And after all I turned out just fine 😄
Ah que j’aime te lire !
Tu es mon nextflix ( read stories) and ride la stib. Hahhahaa
Hahahaha happy to be !